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France

Indignation et "effroi" après l'agression dans le RER D
LEMONDE.FR | 12.07.04 | 09h26
L'enquête sur l'agression à caractère antisémite d'une jeune femme et de son bébé, survenue vendredi dans un train du RER D, en banlieue parisienne, continuait de se heurter, lundi matin, au peu d'informations disponibles. Un appel à témoin a été diffusé, et les enregistrements vidéo des caméras de télésurveillance recueillis par la police. Cet acte a suscité une vague d'indignation générale, après l'appel au "sursaut républicain" lancé jeudi par Jacques Chirac contre les actes racistes en France. Le chef de l'Etat a exprimé son "effroi" dans un communiqué.

L'enquête sur l'agression antisémite d'une jeune femme dans un train du RER D, vendredi 9 juillet en banlieue parisienne, continuait de se heurter, lundi matin, au peu d'informations disponibles, tandis que politiques et associations réclamaient des moyens à la hauteur pour retrouver les agresseurs.

Le parquet de Cergy a diffusé dimanche soir un appel à témoin demandant à toute personne pouvant apporter des renseignements de se manifester auprès de la direction régionale de la police judiciaire (DRPJ) de Versailles.

La DRPJ recueille par ailleurs auprès de la SNCF tous les enregistrements vidéo des caméras de télésurveillance des gares où se sont déroulés les faits, a précisé le parquet.

Entendue samedi après-midi par les hommes de la police judiciaire de Versailles, la jeune femme, sans pouvoir donner un signalement précis de ses agresseurs, a pu détailler son agression, a indiqué une source policière.

"DANS LE 16e, IL Y A QUE DES JUIFS"

Vendredi, peu avant 9 h 40, le train où elle se trouve avec sa fillette de 13 mois vient de quitter la gare de Louvres (Val-d'Oise), sur la ligne D du RER, quand six jeunes hommes s'approchent d'elle.

Selon ses déclarations, les individus - quatre d'origine maghrébine et deux d'origine africaine -, certains armés de couteaux, la bousculent et l'un d'eux s'empare de son sac. C'est en voyant sur une pièce d'identité une adresse dans le 16e arrondissement de Paris que l'un des jeunes lui aurait lancé : "Dans le 16e, il y a que des juifs." "Il faut noter que cette jeune femme n'est pas de confession juive", a souligné le parquet.

Dès lors, ses agresseurs lui tailladent les cheveux, lui lacèrent jean et tee-shirt en lui griffant la peau de leurs lames et dessinent, au marqueur noir, trois croix gammées sur son ventre.

A la gare de Sarcelles, quinze minutes plus tard, les agresseurs quittent la rame en emportant le sac de la victime et en renversant la poussette avec le bébé.

TRAUMATISME

Arrivée à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), où elle réside, la jeune femme dépose plainte au commissariat. Elle laisse une adresse et un téléphone où les enquêteurs de la PJ ne parviendront à la joindre que samedi après-midi.

Nicole Guedj, secrétaire d'Etat aux droits des victimes, qui s'est entretenue avec la jeune femme par téléphone dimanche, a souligné que celle-ci avait "subi un traumatisme psychologique". Elle a ajouté que "les témoins présents ne l'ont pas secourue". Selon une source policière, on ignorait toutefois si des passagers se trouvaient près d'elle ou dans une autre partie du wagon, notamment à l'étage supérieur, au moment de l'agression. Mme Guedj a ajouté qu'elle allait la rencontrer "dès lundi".

Cette agression, survenue le lendemain de l'appel lancé contre tous les racismes par Jacques Chirac au Chambon-sur-Lignon (Haute-Loire), a provoqué une vive émotion dans la classe politique, à droite comme à gauche, et parmi les associations. Le président de la République a exprimé son "effroi", tandis que le ministre de l'intérieur, Dominique de Villepin, a condamné "une agression ignoble".

De nombreuses voix ont réclamé des moyens à la hauteur pour retrouver les agresseurs. Le président du conseil régional, Jean-Paul Huchon (PS), a appelé les élus franciliens à se rassembler lundi à 18 heures dans l'hémicycle du conseil régional.

Marie-George Buffet, secrétaire nationale du Parti communiste français, a appelé dimanche à "un rassemblement de protestation et de lutte contre la barbarie, l'antisémitisme, les racismes et la xénophobie", lundi à 18 heures, au métro Belleville à Paris (20e). Le PCF appelle "tous les démocrates et tous les progressistes à se rassembler pour manifester (leur) refus d'une société de haine, de division, et de violence".

Avec AFP